♣ On ne renie pas son enfance ; on l'enfouit au fond de son coeur, et l'ombre portée, l'ombre magique devient un symbole.

J'adore être aujourd'hui, je me sens comme une princesse. Tout le monde me fait des bisous, tout le monde me cajole, s'occupe de moi, je me sens parfaite. Je reçois des cadeaux par milliers et toute ma famille est venue pour fêter l'évènement : mon anniversaire. Et puis, il y a aussi mes copines, qui sont là pour jouer avec moi. Les adultes, eux, sont dans la pièce principale, ils parlent et boivent. Leur vie à l'air ennuyante, je n'aimerais pas être comme eux, plus tard. Moi, je rêve de douceur, de surprise, d'émerveillement, de bonheur. Je n'ai peut-être que sept ans, mais je sais déjà ce que je veux, et ce que je ne veux pas, avoir une vie simple, banale, sans aucune joie. Je ne veux pas simplement faire partie de la bourgeoisie et paraître dans des soirées mondaines. Non, je veux une vie de princesse. « Camille ! Regarde, il y a un oiseau à la fenêtre. Il est tellement beau, tu ne trouve pas ? ». J'adore les animaux, la nature, la simplicité en fait. J'aimerais être vétérinaire plus tard, m'occuper des animaux, je pense qu'ils en ont besoin. Je voudrais aussi avoir une grande maison au milieu des champs, courir dans l'herbe, main dans la main avec mon amoureux et entendre les oiseaux chanter. Je sais, je sais, je suis très rêveuse ; c'est ce que tout le monde me dit. Mes parents me le reprochent souvent d'ailleurs. Ils aimeraient que je sois comme eux, réaliste, sérieuse, bourgeoise. Dans la famille, ils sont tous comme ça. Mais moi je me sens différente, je ne me sens pas à ma place dans cette famille. J'ai envie de m'évader, de vivre autre chose. Je n'ai que sept ans, je sais, mais je pense déjà à l'avenir.
(...)
J'en peux plus d'eux. Ils me font chier. Ils veulent tellement prévoir mon avenir à ma place, ils s'en foutent de mon avis. Tous mes rêves, tout ce que je veux, ils s'en foutent. Ils ne pensent qu'à leur bourgeoisie de merde, qu'aux apparences. Je ne veux pas ça, non, je veux plus. Je veux être libre, arrêter de me prendre la tête, devoir faire attention à ce qu'on pense de moi. Je suis loin de leur univers. Je suis dans un autre monde. C'est vrai, quelques fois, j'aime les moments privilégiés que je peux avoir ; il n'y a pas que des mauvais côtés à être riche, parfois c'est bien. Je peux m'acheter ce que je désire, ne pas me prendre la tête pour des questions d'argent, aider ceux dans le besoin aussi. Non, c'est vrai, je ne peux pas leur en vouloir. Mais quelques fois, j'aimerais qu'il n'y ait pas d'histoire de classe. Être tranquille, ne pas être obligée d'aller dans des soirées mondaines, faire ce que je veux de ma vie, avoir mes rêves, mes ambitions, à moi.

♣ C'est donc cela, la vie d'adulte : construire des châteaux de sable, puis sauter dessus à pieds joints.

Avec lui, je suis quelqu'un d'autre. Je ne suis pas la jeune femme pleine de vie, souriante, gentille et drôle. Non, je ne suis pas moi. Je suis quelqu'un que je ne reconnais pas, je suis quelqu'un que je n'aime pas. Mais je ne peux m'empêcher d'être comme ça, en sa présence. Je ne peux arrêter d'agir comme je le fais. Il ne comprend pas que c'est à cause de lui que je change, que c'est à cause de ses actes. Il se demande pour quelles raisons je me suis transformée en une autre personne, pour quelles raisons je ne suis plus comme à notre rencontre. C'est sa faute si je ne me reconnais plus. « Pourquoi tu me regardes comme ça ? ». C'est vrai, je l'agresse quand je lui parle. Je le reconnais, mais c'est plus fort que moi. Sa façon d'être m'exaspère même si je sais qu'au fond de moi, je l'aime. « Et toi, pourquoi tu m'agresses à chaque fois que je fais ou dit quelque chose ? Tu es simplement belle, alors j'ai le droit. De te regarder ». Encore ce couplet pour me dire qu'il tient à moi, que je suis belle et merveilleuse. Je le connais par cœur, il me l'a tellement répété. Mais ce qu'il n'a pas compris, c'est que je m'en fou de ses paroles, de ses mots. Je n'y crois pas, ou plus. Il m'a fait souffrir, beaucoup trop. Alors je ne vais pas lui pardonner comme ça, juste parce qu'il me dit des mots doux, non ça serait trop facile. Je veux qu'il comprenne qu'il a mal agit, qu'il n'aurait jamais du partir, sans un mot. Moi qui croyait qu'il tenait à moi, qu'on allait faire notre vie ensemble. Je me suis fait des illusions et je l'ai attendu. J'ai vraiment cru qu'il allait revenir. Mais au bout d'un mois, j'ai compris qu'il c'était foutu de moi et que je devais continuer ma vie. Je me suis reconstruite, j'ai continué de vivre, sans lui. Et puis, un beau jour, il est revenu. Il a vraiment cru que j'allais lui sauter dans les bras, mais non, je n'ai pas oublié ces deux mois de souffrance, de manque. « Tu ne penses quand même pas que tout va être effacé, comme ça, par magie ? Je veux que tu arrêtes de me dire ça Cédric, je veux seulement que tu arrêtes. J'ai trop souffert. Et c'est de ta faute. Je ne veux plus que tu me parles de cette façon, je veux que tu arrêtes de me faire des compliments. Si je suis comme ça, vois-tu, c'est parce que j'ai compris que je devais arrêter d'être tendre avec toi. Il faut que j'arrête de croire que l'histoire se finira bien ». Je ne sais combien de fois je lui ai répété. Mais il n'arrive pas à comprendre que j'en ai marre d'être amoureuse de lui. Ça serait mieux pour moi si je l'oubliais, mais s'il reste près de moi, jamais je ne pourrais. Et puis j'ai le droit d'être comme ça. On était heureux tous les deux. On avait fait des projets d'avenir, on rêvait à deux, il me soutenait, on s'aimait. D'un coup, il est partit, prétextant qu'il désirait prendre du recul sur nous, sur notre relation. Un mot, un simple petit mot sur la table de nuit à côté de notre lit. Et voilà, deux mois sans nouvelles, sans un coup de téléphone. J'ai pris sur moi, j'ai consulté un psy. Je voulais vraiment me dire que cette belle histoire n'avait jamais existé et qu'il fallait que je passe à autre chose. Et alors que j'avais presque réussit, il est réapparu dans ma vie. Il m'a dit qu'il m'aimait et qu'il était désolé de son départ précipité. Il m'a avoué que notre relation était allée trop vite, que ces deux ans ensemble étaient passés beaucoup trop rapidement et qu'il se devait de faire le point seul. Il croyait que j'aillais revenir avec lui, comme si rien ne s'était passé. Mais entre temps, je suis tombée enceinte, de lui. Il ne le sait pas et heureusement. Il m'aurait dit qu'il voulait qu'on l'élève ensemble, qu'on forme une famille. Je ne veux pas de lui moi, je ne veux plus qu'il fasse parti de ma vie. Et puis, en ce moment, je le vois partout, il me suit, j'ai l'impression. Il se pose des questions aussi, je crois. Il a des doutes. Il saura bientôt la vérité. Il saura bientôt que j'attends un enfant. « Je suis désolé Capucine, vraiment. J'aimerais tellement tout reprendre depuis le début, et je t'assures que j'aurais agit autrement. Je voulais simplement savoir si tu étais la femme de ma vie. Et maintenant je le sais. Je sais que je te veux comme femme, que je te veux pour la vie. Je n'ai pas oublié tous nos projets ; je veux qu'on les réalise, qu'on soit heureux. Tu verras, avec le temps, tu comprendras, tu me pardonnera. Je t'aime et je ne peux m'empêcher de te trouver belle. Fais-moi confiance ». Que des mots en l'air, il peux toujours rêver. « C'est trop tard Cédric ».